Tour de l'Avenir : L'heure du bilan pour la Belgique

"Mission accomplie", se félicite Jean-Pierre Dubois à l'arrivée finale du Tour de l'Avenir. "Deux étapes et un top cinq au général, j'aurais signé pour !", ajoute le sélectionneur national des Espoirs belges, faisant référence aux étapes remportées par Dylan Teuns et Louis Vervaeke, lui-même cinquième du général. "Dès le prologue, on prend la cinquième et la dixième place avec Loïc Vliegen et Louis Vervaeke, au milieu des favoris. C'était déjà rassurant." Pour DirectVelo.be, le coach des Espoirs fait le bilan complet du Tour de l'Avenir.
 
LOUIS VERVAEKE, PAS LOIN DU PODIUM
 
« Louis Vervaeke rêvait du jaune, finalement il empoche un top cinq et une étape avec la manière, mission accomplie. Au Plateau de Solaison, pour la dernière étape de montagne, on ne savait pas à quoi s'attendre. Les Colombiens ont marqué le coup directement. Louis était déjà pointé parmi les meilleurs, et on s'attendait à ce qu'il se bonifie d'étape en étape. Il voulait vraiment frapper fort, et il a réussi. Tout s'est bien goupillé. Loic se sentait bien et était dans le bon coup. C'était important car ça pouvait déstabiliser les Colombiens. Il a attendu Louis qui ainsi n'a pas dû travailler. Dans la Croix de Fer, Louis est parti en solo et a creusé rapidement l'écart. Dans la descente, il parvient encore à creuser l'écart, mais on avait peur qu'il perde du temps dans la vallée. Finalement, il a encore pris une minute ! Il a fait un numéro, même si on sait que c'est un bon rouleur et qu'il avait le vent de dos. Il a vraiment des qualités similaires à Tim Wellens. 
Ce n'était pas vraiment prévu qu'il attaque si tôt, même si on savait qu'il faudrait anticiper pour mettre en danger le Colombien. Je le voyais plutôt partir dans la Croix de Fer, mais il avait de bonnes sensations et a décidé d'attaquer avant la deuxième ascension, après environ quinze kilomètres. On espérait alors tant l'étape que le général. J'ai compris qu'il gagnerait l'étape à dix kilomètres de l'arrivée, car il roulait à un bon rythme et ne perdait pas trop de temps alors que les Colombiens et les Australiens ont roulé. D'ailleurs, je ne sais pas pourquoi ils ont roulé. Ils n'avaient pas le maillot jaune, donc ils auraient dû laisser le poids sur les épaules des Colombiens. La victoire d'étape était acquise, mais ça semblait difficile pour le maillot jaune ! On peut aussi regretter qu'il doive mettre pied à terre après un ou deux kilomètres dans la Toussuire car une pierraille s'était glissée entre sa jante et son frein. Mais s'arrêter comme ça, en pleine ascension, il a fait preuve de lucidité. Quand on compte ce temps là, plus les 20 secondes de pénalité du mercredi, on n'est pas loin du podium.
 
LOIC VLIEGEN A SERVI DE TREMPLIN
 
Loïc Vliegen a commencé fort au prologue, sur un parcours court mais difficile, avec une petite bosse. Ce n'est pas un spécialiste et il n'a pas disputé beaucoup de chronos dans sa jeune carrière, mais faire cinquième à cinq secondes du vainqueur, c'est bien. Après, il peut avoir beaucoup de regrets dans la deuxième étape dont il fait neuvième. Avant le départ, je pensais que c'était soit pour lui, soit pour Benoot. Il voulait vraiment aller la chercher, mais ce n'est pas évident à ce niveau. Le final était très technique et Loïc était placé un peu trop loin, un peu esseulé. Certes, quand Caleb Ewan gagne, c'est difficile de le battre, mais il aurait pu créer la surprise. Au final, il fait neuvième. C'est dommage car vainqueur d'une étape du Tour de l'Avenir, ça veut dire beaucoup dans un CV.
Puis le dernier jour, il a fait un gros boulot. Il est parti en échappée puis a attendu Louis quand il a appris qu'il était sorti en contre. Ensuite, il a bien roulé pour lui. Il a vraiment servi de tremplin pour la victoire de Vervaeke, et ce jusqu'au pied de la Croix de Fer. Louis n'a pas du donner un coup de pédale, il a vraiment été important.

FLORIS DE TIER A BONNE ECOLE

Floris De Tier a perdu du temps dans la première étape de montagne. Dans la descente avant le plateau de Solaison, il a été distancé dans des cassures et n'est plus jamais revenu. Ca lui a déjà fait perdre beaucoup de temps. Il a encore un peu de travail en descente ! Il a peur malgré que ce soit un ancien... cyclocrossman ! Après, il a fait ce qu'il pouvait pour aider le groupe. Dès le lendemain, il a pris sa revanche en étant dans la bonne échappée. C'est toujours intéressant pour l'équipe d'avoir un gars devant, d'autant plus quand on sait que c'est Dylan qui gagne l'étape. Ainsi, on n'a pas dû porter le poids de la course. Il s'est bien rattrapé de sa mauvaise descente. Après, quand on voit que même des gars comme Latour sont en difficultés, on comprend qu'il faut être un pur grimpeur pour pouvoir s'exprimer sur de tels parcours. Ça ne fait qu'un an qu'il fait de la route, mais je le vois plutôt comme un gars pour les Ardennaises. Il est aussi toujours prêt à travailler pour les autres. Ça en fera un bon équipier chez Topsport Vlaanderen où il sera à bonne école.
 
DYLAN TEUNS, LA SURPRISE
 
Dylan Teuns a servi de dernier pilier pour Louis Vervaeke. Il avait reçu carte blanche pour ne pas se sacrifier dès le début. Etant un outsider, je préférais le garder en réserve, même s'il doit s'incliner face à de purs grimpeurs. La cinquième étape lui convenait bien même si je voyais plutôt des gars comme Benoot et Vliegen se distinguer. Loic a fait trop d'efforts au début, mais Dylan a créé la surprise en allant chercher la victoire - notre photo -. C'était l'étape que j'avais coché pour la Belgique, on l'a fait ! Puis après, je savais que je pouvais compter sur lui pour épauler Louis en montagne. Même si ce n'est pas si simple, il l'a bien fait, comme vendredi par exemple.
 
JEAN-ALBERT CARNEVALI A ACCOMPLI SA MISSION
 
Jean-Albert Carnevali a vécu une course un peu plus difficile, mais c'est normal car il ne s'y attendait vraiment pas. On peut surtout être content qu'il ait pu nous rejoindre en dernière minute ! Heureusement, il n'était pas au repos complet et avait prévu de faire l'une ou l'autre course. Au final, il a dû faire sa valise plus vite que les autres, mais est arrivé en même temps que nous ! A vrai dire, j'ai été averti le jour du départ même du forfait de Bouvry et j'ai dû faire un choix entre mes réservistes. Je n'ai aucun regret à avoir, Jean-Albert a accompli sa mission. Dommage qu'il n'était pas au top, car en forme, il tient beaucoup plus longtemps avec les meilleurs. Il a montré une bonne mentalité, c'est une belle découverte car c'est un coureur que je ne connaissais pas du tout. S'il continue à bien évoluer, il pourrait bien revenir en équipe nationale car il dispose d'une belle marge de progression. 
 
TIESJ BENOOT, L'INQUIETUDE
 
Tiesj Benoot est le cas le moins rassurant. Il devait subir des contrôles sanguins, mais suite à une erreur quant à l'identification des échantillons, ils n'ont pas été analysés. Quand on a sonné au laboratoire, il était déjà trop tard. Nous avons donc décidé d'attendre notre retour en Belgique. On a perdu une semaine. De plus, des ganglions sont apparus pendant la semaine. On craint une rechute de la mononucléose qui l'avait déjà fait rater la fin de saison l'an passé. On espère que c'est juste une infection qui ne foutra pas sa fin de saison en l'air. Ce serait dommage pour les mondiaux. 
Du point de vue sportif, son prologue s'est bien déroulé, mais dès la première étape, ça n'allait pas comme il voulait. Tiesj pensait à un refroidissement, mais au final, on ne sait pas ce qu'il a. Il a décidé de continuer l'épreuve pour aider Louis Vervaeke au maximum. Au pied de l'ascension des Saisies, dans l'étape de jeudi, il sentait qu'il allait trop puiser dans ses réserves et a décidé de mettre pied à terre. Mais il est resté avec nous. Vendredi, il a suivi l'étape dans la voiture, et samedi, il est allé avec un soigneur.
 
L'HOMMAGE A IGOR DECRAENE
 
Je tire donc un bilan plus que satisfaisant de ce Tour de l'Avenir. Je me répète, mais dans la cinquième étape, n'importe qui pouvait gagner. Pour les autres, on savait que ce serait plus dur car il fallait que des échappées prennent 4 à 5 minutes au pied de la dernière ascension pour pouvoir résister. 
Enfin, l'incompréhension a régné quand on a appris le décès d'Igor Decraene. Ca a assommé tout le monde. Mes coureurs, soigneurs, ... le connaissaient bien. Au départ, j'aurais voulu annoncer la nouvelle après l'étape, pour ne pas déstabiliser et déconcentrer mes coureurs. Mais il y avait un membre belge dans le jury qui a appris la nouvelle. Une minute de silence a donc été décidée. Ce que je retiendrai surtout, c'est l'hommage que Louis a rendu à Igor sur le podium, quand on l'a interrogé. Ce n'était pas le plus beau jour de sa carrière, car Igor nous a quitté. Ca laisse un vide pour tous les coureurs. Un accident, ça peut arriver à tout le monde. »

Crédit photo : Alexanne Bonnier
 

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