Le baroudeur égyptien

Heureusement qu'il y a eu Islam Shawky. Depuis une semaine de course sur le Tour du Rwanda, le coureur égyptien, stagiaire au Centre Mondial du Cyclisme, est le seul à avoir osé chatouiller le bloc rwandais (trois équipes nationales de cinq coureurs faisant cause commune). Sur la course, la partition est très réglée : les arrivées en côte (et le prologue) pour Jean Bosco Nsengimana, le maillot jaune infaillible qui s'apprête à décrocher la victoire finale ce dimanche. Et les sprints pour les Erythréens, Mekseb Debesay (Bike Aid) à deux reprises, Meron Teshome (Equipe nationale) une fois.

Shawky ne s'est pas laissé impressionner. "Je vais essayer de gagner une étape", avait-il prévenu samedi matin, au départ de Rubavu, sur les rives du Lac Kivu.

TOUTE SON EQUIPE ELIMINEE

Aussitôt après le départ, il attaque, à froid, dans une côte de quelque trente kilomètres qui s'élève au-dessus des brumes et des champs de haricots : il en passe vingt en tête, perdus d'avance au vu du faux plat roulant, favorable au peloton. Puis il repart à l'offensive, toujours seul, pour 45 kilomètres d'effort, avant de plonger sur Kigali. La pluie est cinglante (voir la vidéo). "J'ai cru que c'était possible », dit-il, alors que son avance culminait à 1'50''. « Mais j'ai beaucoup souffert...".

Ouvrir une brèche, c'était sa volonté. Islam Shawky, 20 ans, est le seul rescapé de la sélection égyptienne depuis l'élimination de ses quatre coéquipiers le deuxième jour, tous hors-délais. "On ne peut pas les repêcher, ils n'ont pas le niveau sur une étape vallonnée et demain, nous attaquons la montagne", avait expliqué mardi le jury des commissaires. Les « Pharaons » (surnom venu du foot) en étaient à peine à leur reprise de l'entraînement, surtout motivés par le Tour de Sharjah, qui s'élance dans dix jours, aux Emirats. Le souci (pour eux), c'est le relief rwandais, et le niveau en nette hausse des participants. Impossible de s'abriter dans les roues.

ATTIRE PAR LES BOSSES

"Je ne suis pas au maximum de ma forme, mais je suis très content de venir sur le Tour du Rwanda, parce que j'ai l'occasion de grimper, raconte Shawky à DirectVelo. Je suis originaire de Port-Saïd, où les routes sont plates. Lorsque je pars rouler jusqu'au Caire, pour mes sorties de 5 ou 6h, le terrain est plat, plat... Il me faut des côtes pour progresser."

L'ex-nageur en haute mer a trouvé les bonnes crêtes cet été, au pied des montagnes suisses. Stagiaire pendant un mois au Centre Mondial du Cyclisme (CMC), il se signale par une 3e place en France, sur le Prix de Chavanne-sur-Reyssouze, dans l'Ain. "C'est le vrai vélo ! s'enthousiasme-t-il. L'équipement est super, les entraîneurs nous donnent de très bons conseils."

LE CMC + UNE EQUIPE CONTINENTALE ?

Shawky espère passer une saison complète au CMC, en 2016. Tout en évoluant sous les couleurs d'une équipe Continentale du Maghreb ou du Moyen-Orient. Rarement engagé sur des épreuves par étapes (il a enchaîné le Tour du Maroc et le Challenge du Prince avant de découvrir le Rwanda), il a terminé 13e du chrono sur les Jeux Africains. Son objectif : percer en Europe.

Passionné de lecture et de mécanique (son père travaille comme garagiste), Shawky est d'un naturel calme. Il ne veut pas brusquer les choses, sauf quand il voit un peloton verrouillé à double tours.

Son entraîneur, Ibrahim Mostafa, freine lui aussi : "Islam est un de nos meilleurs coureurs, il a un potentiel remarquable. Mais il n'a que vingt ans. Qu'on lui donne encore un peu de temps !"

Crédit photo : Pierre Carrey - www.directvelo.com
 

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