Swiss Racing Academy : « Avec un peu d’idéalisme... »

Crédit photo William Cannarella

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Swiss Racing Academy a dû rapidement s’adapter pour permettre à ses jeunes coureurs de traverser cette longue période sans compétition (voir l'effectif). Si la saison repart, l’équipe Continentale suisse sera prête comme elle l’a rapidement fait savoir aux organisateurs. “Il était important d’envoyer un signal, de montrer que nous étions prêts et mobilisés”, estime Thibault Hofer. Le manager espère surtout que cette crise permettra “de changer de regard” et offrira au monde du cyclisme l’opportunité de se remettre en cause. Comme il l’explique à DirectVelo.

DirectVelo : Comment l’équipe vit-elle la situation actuelle ?
Thibault Hofer : Je crois que l’on peut dire que l’équipe est aujourd’hui dans une phase d’expectative et d’espoir d’un retour à la compétition, donc plutôt bien. C’est un état d’esprit optimiste que nous avons souhaité entretenir, et que nous maintenons, tout au long de cette crise, par nécessité, mais également par solidarité pour nos partenaires, les organisateurs de courses, les autres formations et tous les acteurs qui font vivre notre sport. La pandémie a porté un coup d’arrêt extrêmement violent au cyclisme professionnel dans son ensemble, ce qui a une fois de plus, mais de manière sans précédent, révélé certaines des fragilités de son système, notamment économiques. Nous n’avons pas paniqué, mais les périodes de doutes ont parfois été difficiles à vivre, il a fallu renforcer nos modes de communication avec les coureurs pour préserver ce qui est essentiel chez nous et qui nous permet d’affronter les difficultés, l’esprit d’équipe.

« EN EMPATHIE AVEC NOS VOISINS EUROPÉENS »

Et comment les coureurs ont-ils réagi ?
Dans un premier temps, nous avions anticipé une éventuelle baisse de motivation liée à l’absence d’objectifs clairs à la suite des premières annulations et restrictions. Ça a été le cas pour certains, il a donc fallu agir vite pour mettre en place un suivi adapté, un peu comme un ‘’deuxième hiver’’ pendant la saison, pour éviter le surentrainement, en profiter pour travailler certaines spécificités et s’assurer de créer les conditions optimales pour revenir à la compétition sur des objectifs plus lointains. Cette première phase a également été importante moralement, l’ensemble de la société était et continue à être impactée, il fallait trouver la juste place du vélo dans l’équilibre de nos vies de tous les jours. Là aussi, nous nous sommes sentis solidaires de la population, des soignants et de tous ceux qui souffraient de la pandémie. Les coureurs sont aussi des citoyens, on ne pouvait pas avoir une vision égoïste et centrée uniquement sur le sport.

Surtout qu’en Suisse, les coureurs avaient le droit de rouler en extérieur…
Effectivement, c’était une chance si j’ose dire, mais aussi un cas de conscience. Nous étions en empathie avec nos voisins européens qui eux étaient en confinement strict et le respect des règles édictées par les autorités a toujours été la priorité évidemment. Mais dans la mesure où il n’y a pas eu d’interdiction de sortir, nous nous en sommes aussi remis à la responsabilité personnelle de chacun, surtout au début de la crise lorsque cela représentait un risque de surcharge du système hospitalier en cas d’accident. Certains pros suisses ont montré la voie en ayant une attitude exemplaire, le home-trainer et les sorties en solitaire ont donc été l’alternative logique. S’ennuyer un petit peu sur le vélo dans ces deux options n’était qu’un moindre mal par rapport à la situation globale.

« UNE RESPONSABILITÉ SOCIALE »

Qu’en est-il de la réaction de vos partenaires ?
Nous avons bénéficié d’un soutien extraordinaire de la part de nos partenaires. Nous sommes une équipe Continentale de développement, nous travaillons avec de jeunes athlètes ce qui nous donne aussi une responsabilité sociale, c’est une de nos préoccupations. Nos partenaires y sont sensibles et savent que l’avenir sportif de la plupart de nos coureurs dépend de la structure SRA. Ils nous ont soutenus pendant cette crise sanitaire en se montrant compréhensifs, bienveillants et en partageant leur savoir-faire en matière de gestion de crise notamment. Nous leur en sommes redevables et j’espère que nous serons en mesure de nous montrer flexibles également si la très probable crise économique qui se prépare leur pose des difficultés. C’est un des points d’équilibre fragile auxquels je faisais allusion précédemment, les équipes dépendent aujourd’hui principalement du sponsoring. Des possibilités de génération directe de valeur pour les équipes ou une forme de redistribution des moyens seraient par exemple des filets de sécurité dans des situations comme celle que nous vivons actuellement.

À quoi penses-tu ?
On peut définir le cyclisme actuel comme une forme pyramidale avec les plus grandes formations, les plus gros budgets, les plus grandes courses et donc le plus de visibilité à son sommet. Mais les équipes comme la Swiss Racing Academy en constituent la base tout comme les plus petites courses, souvent historiques et aujourd’hui particulièrement menacées, les fédérations locales et les clubs qui font un travail essentiel avec et pour la nouvelle génération de coureurs. Il est légitime de tout mettre en œuvre pour sauver le haut de la pyramide, qui sert aussi d’effet d’aspiration et d’inspiration, mais sans tous ceux qui la soutiennent et qui en représentent l’avenir, elle s’écroulera. Et dans ce cas là, on sera tous dans le même bateau. Toute crise permet aussi de changer de regard et offre une opportunité de se remettre en cause. J’espère, avec un peu d’idéalisme, que celle que nous vivons ouvrira de nouvelles perspectives, plus durables.

« NOUS SOMMES OPTIMISTES »

Es-tu confiant pour la fin de saison de ton équipe ?
Je me dois d’être confiant. En accord avec Guillaume Bonnafond et Sylvain Blanquefort, respectivement Responsable de la Performance et Directeur Sportif chez SRA, nous avons convenu de re-contacter les organisateurs suffisamment tôt, même avant que l’UCI ne valide les calendriers officiels. Il était important d’envoyer un signal, de montrer que nous étions prêts et mobilisés. A ce jour, grâce aux efforts d’adaptation des courses qui le peuvent et il faut les saluer, un nouveau calendrier se dessine, nous sommes optimistes. Les invitations confirmées sont évidemment accompagnées de précautions quant à l’évolution générale de la situation.

Pour la Suisse, le Conseil Fédéral prononcera de nouvelles mesures ce mercredi…
Et celles qui suivront chez nos voisins auront une importance capitale sur les derniers mois de notre saison évidemment. Restera à définir les modalités et possibilités précises d’entraînement en groupe, de voyage, d’hébergement et de participation aux courses, un exercice qui nécessitera là aussi une collaboration étroite entre les autorités, les fédérations et les organisateurs. Si tout se passe bien, nous serons également en mesure de reprendre le cours du développement de la structure, avec des étapes importantes prévues pour 2020.  

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