Philippe Wagner : « L’équipe devra être à la hauteur de la marque »

Crédit photo Nicolas Berriegts - DirectVelo

Crédit photo Nicolas Berriegts - DirectVelo

Pour une première année dans les pelotons, Philippe Wagner Cycling a connu des hauts et des bas durant la saison. Alors qu’à l’origine un projet de Continental, voire même de ProTeam était évoqué en 2023, son président Philippe Wagner et son équipe sportive ont préféré appuyer sur la pédale de frein. L’équipe franc-comtoise sera donc toujours dans le peloton national pour la saison à venir. Mais cette fois, la date de 2024 est bien arrêtée pour franchir le Rubicon. À l’occasion de la présentation du cru 2023, Philippe Wagner s’est entretenu avec DirectVelo sur cette première saison, la tournure que prend le projet et la place du chef d’entreprise dans le milieu du vélo.

DirectVelo : Quel est ton bilan de cette première année ?
Philippe Wagner : En quatre mois on a monté une équipe et on performe aussitôt. Certes ça n'a pas été victoire sur victoire non plus. Mais on a surtout créé une vraie identité et c'était ça le plus important.

Quels moments forts retiens-tu ?
Il y a eu la première victoire déjà (au Tour du Centre Var avec Alexis Caresmel, NDLR). Un autre grand moment, ça a été dans les Ardennes, il a fait très froid, c'était très difficile et ça a mis nos coureurs à rude épreuve. Il y a eu le Tour Alsace, le Tour de Normandie. En Normandie ils affrontaient les professionnels pour nos premières courses.

Il y a eu des moments plus compliqués aussi...
On a été obligé de faire des ajustements en management. Mais on démarre d'un point zéro donc c'est normal. On a cherché à se renforcer avec Dylan Guinet qui est venu en cours de saison, car d'autres coureurs ne performaient pas comme on l'espérait. Mais c'est normal, ça fait partie de la vie, mais on a réajusté en recomposant au cours de l'année.

« ON VA CRÉER CE PROJET ENSEMBLE »

Tout a été très vite à la création de l’équipe !
Pour moi, ce qui était important, c'était d'avoir une histoire à raconter aux coureurs. Ne pas être un club pour être un club. Aujourd'hui, c'est de prendre la route qui est le plus difficile. On ne sait pas où on s'arrête. On prend le chemin ensemble, on avance et on verra où ça nous mène. On va créer ce projet ensemble.

Pourquoi s'être engagé avec ce timing-là ?
On s'est lancé à fond dans la communication pour faire connaitre la marque Philippe Wagner. On l'a fait à travers l'équipe mais aussi au travers de partenariats, sur des Championnats, à Namur (au Championnat d'Europe de cyclo-cross, NDLR) etc. On est partenaire de l'UEC pour qu'on nous voit, ce sont deux supports différents. Le meilleur moyen de nous faire connaitre, c'est le monde du sport. C'est le miroir, l'équipe se développe, la marque se développe, et vice versa. On commercialise de Lille à Marseille, je vais attaquer le secteur ouest, et la marque va continuer à grandir. Donc plus on est vu, plus on sera connu.

« LE PREMIER SUJET, C’EST LE VÉLO »

Quel est ton lien avec le vélo ?
J'ai toujours fait du vélo, depuis tout petit. Je me souviens de mon premier vélo offert par mes parrains à ma communion. Je faisais des tours autour de chez moi, 20-30 kilomètres. Je n'ai jamais été très bon (sourire), mais on peut aimer le vélo sans être très bon. J'ai toujours cette passion. En tant que chef d'entreprise, je trouve que c'est un très bon vecteur de communication. Je dis toujours qu'au foot ou au rugby il faut aller au stade. Nous, on va au devant des gens, on nous voit sur la route, à l'entrainement. On ne paie pas pour aller voir une course, c'est universel et c'est ce qui me plait. C'est un sport difficile, d'engagement, et d'équipe.

Tu n'as jamais regretté ton investissement ?
Jamais ! Au-delà de tout ça c'est aussi un projet d'entreprise. Dans toutes les entreprises on parle boulot. Chez nous on parle aussi vélo. Les collaborateurs commencent à venir aux courses. Au Tour de Rhuys, j'avais tout un encadrement. J'organise un challenge vélo dans l'entreprise, on était 150, avec tous les collaborateurs. Le vélo est au cœur de l'entreprise. Quand il y a des négociations commerciales, le premier sujet, c'est le vélo. On ne parle plus de prix ou je ne sais quoi. Tout ça est important.

L'équipe a fait parler, comment penses-tu être perçu dans le peloton ?
Je n'écoute pas ce qui se dit. Il se dit des choses à tous les niveaux. Il y a du monde du vélo qui est là (à la soirée de présentation, NDLR), même peut-être certains qui ont parlé sur moi mais je m'en fiche. Le plus important est de passer un moment ensemble. On va performer cette année, on s'est renforcé pour ça. On a une des plus belles équipes de N1, ça prépare bien le passage pro.

« IL FAUT SAVOIR POSER LES CHOSES »

Tu as annoncé dans un premier temps un passage chez les pros en 2023, avant de reporter. C'était un échec pour toi ?
Non, je pense qu'on a été un peu présomptueux, mais il faut toujours un peu d'optimisme. Je me suis rendu compte qu'il fallait se roder un peu plus, on a fait des réajustements. Pour cette année aussi. Il nous fallait encore un peu de rodage, je me méfie toujours de cette logique de gagne. On croit qu'on réussit tout du premier coup, on s'était mis ça en tête. Et puis je me suis dit que ce n'était pas réalisable.

Quand on est chef d'une entreprise qui tourne bien, est-il difficile d'être patient ?
Je préfère bien faire les choses. La décision de repousser le projet pro était la mienne. J'ai réuni des collaborateurs et tout le monde m'avait dit de le faire. Mais j'ai dit non, je préférais qu'on soit bien préparés et performants. On a été vite. Mais il faut savoir poser les choses. Je me suis senti mieux intérieurement, d'ailleurs. Ça me mettait une pression et ce n'est pas bon. Donc je préfère jouer la patience, même si je préfère parler de construction.

« L’ERREUR QU’ON A FAITE, C’EST D’ANNONCER UNE PROTEAM »

Tu arrives à déléguer ?
Dans l'entreprise j'ai déjà une équipe autour de moi. Déléguer n'empêche pas de tracer la route, d'imposer et souhaiter des choses. Dans l'équipe c'est exactement pareil. J'ai eu Christophe Moreau, je lui ai dit que l'objectif de l'année était le Top 5. Si en cours d'année des choses dysfonctionnent, je prends des décisions, car la trame est là.

Tu souhaites te lancer seul ou trouver un co-sponsor ?
On cherche un co-sponsor. Mais ça ne nous empêchera pas d'aller en Continental la première année, on a la capacité. L'erreur de communication qu'on a faite, c'est d'annoncer une ProTeam. L'idée est vraiment de passer en Continental, on a un budget proche, et une structure d'une équipe de ce niveau. Mais un co-sponsor sera le bienvenu. On a des contacts.

Es-tu inquiet de voir ce qu'il se passe avec B&B Hôtels par exemple ?
J'ai une différence avec Jérôme Pineau. Je suis à la fois président d'André Bazin, et de Philippe Wagner Cycling. Donc je suis le sponsor principal, alors je sais ce qu'il y a dans les comptes et d'où ils viennent. Jérôme Pineau n'avait peut-être pas tout vu, de son côté.

« IL N’Y A PAS DE SI »

Tu es donc guidé par ce plan Continental 2024 ?
Exactement. On est sorti de nulle part, on a fait une belle saison, on est 15e au Challenge DirectVelo malgré tout. Mais ce n'était pas suffisant, il fallait s'armer, et une partie de cette équipe passera pro avec nous, c'est aussi ça le deal. Avec l'ancienne équipe, il aurait fallu trop remanier.

Le système de montées-descentes est basé sur deux ans et rendra donc son verdict à la fin de la saison 2023. Si Philippe Wagner Cycling n'est pas dans le bon wagon, est-ce qu'il pourrait y avoir des conséquences sur le projet ?
Il y a deux façons de voir les choses. Dans l'objectif qu'on s'est donné, il n'y a pas de si. S'il y a dysfonctionnement on recrutera en cours d'année, on réadaptera. Mais l'objectif clair et précis est de monter Conti. La marque grandit et il lui faudra plus de notoriété. Donc l'équipe devra être à la hauteur de la marque. Alors dans l'esprit on est Conti.

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