Gérémie Nzeke prêt à escalader des volcans

Il adore chambrer, Gérémie Nzeke, le Camerounais de 25 ans qui devrait courir en Auvergne cet été. Janvier 2016, sur la Tropicale Amissa Bongo, au Gabon. Le voilà qui blague dans l'avion pendant un transfert vers Libreville. Extrait : "Vous l'avez vu le coureur rwandais ? Moi non plus je ne l'ai pas vu :  j'étais à l'arrière à m'accrocher. Le gars, il attaque tout le peloton dans le final et ça roule à 100 km/h ! Mais il a mangé quoi ?".

C'est sa façon de raconter qui est tordante. Nzeke, triple vainqueur d'étapes sur le Tour du Cameroun 2015, profite des courses pour s'amuser avec tous les gars qu'il peut croiser. Le reste du temps, il est " plutôt seul", à Yaoundé, la capitale politique, entre ses entraînements et ses études d'ingénieur en informatique. "Les plus beaux moments de ma vie, je les ai passés avec des cyclistes", dit-il.

Il court pour la Société Nationale des Hydrocarbures, le fameux SNH Vélo Club. La plus grande équipe du pays, une véritable Continentale qui ne demande pas son label à l'UCI. Selon ses finances du moment, elle envoie en Auvergne chaque été quelques-uns de ses onze coureurs, grâce à un partenariat avec le comité cycliste régional.

Nzeke devrait être du voyage en France cette année. "Je prie pour que ça se fasse !", lâche-t-il. L'expérience lui permettrait d'exaucer son "rêve depuis toujours" et lui offrirait, au passage, une préparation adaptée pour le Grand Prix Chantal Biya (2.2), prévu en octobre, dont il a pris la deuxième place en 2015.

UN SPORT A RISQUE

C'est aussi grâce à la SNH que Gérémie Nzeke touche un salaire mensuel : 100 000 francs CFA, soit 150€ environ. "Le vélo est un sport de riche pratiqué par des pauvres", rappelle-t-il.

Il s'y est mis un peu sur le tard, à l'âge de 18 ans, un jour qu'il roulait en mobylette dans sa région d'origine, du côté de Douala. Fasciné : "Je me suis fait doubler par des cyclistes. Je me demandais comment des hommes pouvaient dépasser une moto... ". Malgré les sept enfants dans la famille, les parents acceptent qu'il se lance dans ce sport si coûteux, si ingrat ; en un mot, si risqué. "Une chance, dit-il. Mes parents m'ont appris que si je voulais bénéficier de quelque chose, il fallait étudier. Ensuite, je serais récompensé."

Son modèle est un autre coureur d'Afrique de l'Ouest : Isiaka Cissé, stagiaire au Centre Mondial du Cyclisme, 33e du Tour de l'Avenir en 2014, à son avantage sur des épreuves amateurs de l'Est de la France, réputé pour "sentir les coups dans les échappées".

"J'aime beaucoup parler avec Isiaka, raconte Gérémie. Je lui demande des conseils dans le peloton et en dehors. J'aimerais avoir le même parcours que lui". Après deux saisons en Afrique, Cissé retourne en Europe en 2016, sous le maillot du SC Nice Jollywear (lire ici). En attendant de suivre, peut-être, le même chemin, Gérémie Nzeke se prépare dans les bosses du Cameroun, parfois très sévères, à la façon des cols d'Auvergne.

Crédit photo : DR

Par Nicolas Loth

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Portrait de Gérémie NZEKE