François Trarieux : « Il était grand temps d’arriver à l'hôtel »

Crédit photo DR

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L’équipe de France de cyclo-cross a pris ses quartiers lundi soir au Home2 Suites by Hilton de Springdale (Arkansas). À l’inverse des Pays-Bas, de l’Italie ou de la Belgique, tous les coureurs sélectionnés par François Trarieux ont pu faire le déplacement aux États-Unis. “On a beau faire attention, on sait qu’un cas de covid peut arriver, même s’il ne faut pas tomber dans une psychose”, confie le sélectionneur tricolore. Il fait le point avec DirectVelo sur le contexte très particulier de ce Championnat du Monde de Fayetteville, ses choix de sélection et les ambitions françaises.

DirectVelo : Tous les Français ont pu monter dans l’avion pour les États-Unis. Est-ce une première victoire ?
François Trarieux : Depuis l’arrivée d’omicron, nous avons pris des mesures en interne pour limiter les risques et se prémunir de tout ça. On a l’impression de faire les choses comme il faut mais ça peut vite éclater. On a mis en place un protocole strict depuis la Coupe du Monde de Flamanville. Nous avons déplacé peu d’effectif, ce qui a permis d’avoir des chambres individuelles. Il fallait limiter les interactions. Le week-end dernier, à Hoogerheide, j’avais demandé un service en chambre, être à part des autres équipes dans l’hôtel… On a aussi fait tourner les staffs pour limiter les contaminations en interne. Il y a quand même eu deux membres du staff qui ont été positifs. Eric Salvetat a dû être remplacé par Arnaud Jouffroy. Et vendredi dernier, un mécano qui devait venir a été testé positif.

L’attente du dernier test en Europe a dû être stressante pour les coureurs…
Ils ont été testés dimanche matin, avant la Coupe du Monde de Hoogerheide, pour lever les doutes. Certains n’ont pas bien dormi dans la nuit de samedi à dimanche. Je ne voulais pas que la crainte d’être positif impacte sur leur course à Hoogerheide. Ce n’est que du vélo mais il y a quand même des enjeux. Tu t’inquiètes pour les coureurs, tu souhaites qu’ils puissent disputer le Championnat du Monde, tu as forcément envie que ça se passe bien.

Ça doit être très pesant…
Je fais le Championnat du Monde depuis 2016 avec l’équipe de France et il est évident que c’est particulier. Le fait que ce soit aux États-Unis complique les choses. On a une épée de Damoclès au-dessus de la tête. On a essayé de limiter les risques. Par exemple, les Juniors n’ont pas été en cours depuis quinze jours car on sait qu’il y a beaucoup de contaminations à l’école. Il y a eu beaucoup de sacrifices pour être présent à ce Championnat du Monde. En cas de covid sur place, il faudra réagir rapidement. Mais le plus délicat à gérer, c’était le trajet entre Hoogerheide et Fayetteville. Heureusement, l’avion n’était pas trop chargé, on a pu s’espacer un peu. Il était grand temps d’arriver à l’hôtel. On peut enfin souffler même si bien sûr on fait toujours attention. Maintenant, on croise les doigts. J’espère que le sportif va prendre le dessus ces prochains jours.

« IL Y A LA RÉALITÉ DU TERRAIN »

Tu as retenu quatorze coureurs. Au premier abord, c’est peu…
Il faut faire avec le budget de la discipline, qui n’est pas olympique. J’ai connu le budget en décembre, il a fallu faire des choix en réduisant drastiquement le programme. Il y avait ensuite un nombre de coureurs à retenir pour le Mondial, et finalement ça correspondait aux critères de sélection ou des performances qu’on attendait. J’aimerais emmener plus de coureurs et avoir un programme plus densifié mais il y a la réalité du terrain. On est plusieurs nations dans le même cas. Sur ce Championnat du Monde, on a autant de coureurs que la Grande-Bretagne ou ce qu’avait prévu l’Italie avant d’avoir des coureurs positifs au covid. Les Néerlandais n’ont que deux Élites et un seul Junior chez les Hommes. C’est restreint, mais ça ne nous empêchera pas d’avoir les meilleurs Français.

Avec donc au total trois coureurs chez les Juniors.
Louka Lesueur et Corentin Lequet ont fait des podiums en Coupe du Monde. Chez les Filles, Lilou Fabrègue a obtenu trois Top 10, deux en Coupe du Monde et un au Championnat d’Europe. Electa (Gallezot) pouvait prétendre à une sélection mais elle s’est blessée (lire ici). Par ailleurs, il a fallu faire avec les conditions sanitaires aux États-Unis, et avoir ses deux doses de vaccin. Ce n’est pas le cas d’Olivia Onesti (chez les Espoirs, NDLR) qui n'avait qu’une dose comme elle avait eu le covid. Il y avait par ailleurs des coureurs pas vaccinés. Chez les Espoirs Hommes, les trois coureurs (Joris Delbove, Antoine Huby et Théo Thomas, NDLR) ont rempli les critères et arrivent en fin de catégorie. J’avais le choix entre mettre trois Espoirs et deux Élites, ou l’inverse. J’ai choisi la première option car ce sont des coureurs encore en formation.

Les Élites Femmes, avec quatre représentantes, sont les mieux représentées…
Nous avons mis le paquet chez les Féminines. Derrière les Pays-Bas, nous sommes la deuxième nation. Elles sont quatre à remplir les critères. Hélène Clauzel a été la plus régulière cette saison. Anaïs Morichon sort des Espoirs. Caroline Mani est en fin de carrière, c’est la capitaine de route. Il ne faut pas oublier qu’elle est la dernière Française à être montée sur le podium du Mondial (2e en 2016, NDLR). Elle a l’expérience des Mondiaux. Et elle a fait un bon hiver aux États-Unis. Perrine Clauzel a été moins “clinquante” que l’an passé mais elle a tout de même fait plusieurs places entre 10 et 15. Il faut travailler pour rester au contact des Néerlandaises, même si les moyens ne sont pas les mêmes. Pour les Espoirs, Line Burquier et Amandine Fouquenet ont fini 4e et 5e du Championnat d’Europe. Elles ont toutes les deux fait un podium en Coupe du Monde. Les Néerlandaises sont les grandes favorites mais il faut les faire douter, comme Amandine avait réussi à le faire en début de course au Championnat d’Europe.

« ON SAIT AVEC QUI ON VA JOUER »

Qu’est-ce que serait un Championnat du Monde réussi ?
C’est tout bête mais la première étape est de préserver les coureurs sur l’aspect sanitaire. On va aménager la semaine de chacun pour qu’ils puissent être performants au maximum ce week-end. Chaque organisme va récupérer différemment du voyage. Sur le plan sportif, certains viennent jouer le podium, d’autres un Top 5 ou 10. On va se battre pour aller chercher des médailles chez les jeunes. En Juniors, par exemple, on sait avec qui on va jouer. David Haverdings et Nathan Smith sont au-dessus. Les Français sont à la lutte avec les Belges Kenay De Moyer et Yordi Corsus. Lilou Fabrègue a elle fini dans le Top 5 à Tabor. Elle a les moyens de le refaire. Chez les Espoirs Femmes, il faudra faire la course parfaite car les trois Néerlandaises (Puck Pieterse, Fem van Empel et Shirin van Anrooij, NDLR) figurent dans le Top 7 Mondial avec les Élites. Il faudrait qu’elles soient sous pression et se loupent.

Est-ce vraiment possible ?
Il y a déjà eu des loupés. Quand Marion Norbert-Riberolle est Championne du Monde Espoirs il y a deux ans, elle avait fait un seul podium de l'hiver. Manon Bakker avait dominé la saison et elle n’avait pas fini sur le podium du Mondial. Chez les Espoirs Hommes, on espère en mettre le maximum dans le Top 10. En Élites, Hélène Clauzel et Joshua Dubau ont fait un beau Championnat d’Europe. Ils peuvent réitérer ça ici. Pour Clément Venturini, le but est d’aller faire une belle course et montrer ses qualités de crossman. J’y crois. Il y a des places à prendre sur un Championnat du Monde. Ça va surtout dépendre de la manière dont les coureurs vont encaisser le voyage.

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