Anthony Ravard : « L’équipe doit servir au territoire »

Crédit photo Freddy Guérin / DirectVelo

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Deuxième saison au niveau Continental satisfaisante pour le CIC U Nantes Atlantique. La structure nantaise est parvenue à remplir la plupart de ses objectifs et souhaite garder le cap à moyen terme avec, toujours, l’ambition affichée de monter en ProTeam en 2025. Mais pas que : les bleu-et-jaune souhaitent également ouvrir leur académie aux féminines et profiter de la présence d’une équipe professionnelle en Loire-Atlantique pour créer des vocations dès le plus jeune âge. Entretien long format avec le manager général de la structure, l’ancien coureur professionnel Anthony Ravard, qui ne manque pas d'idées. 

DirectVelo : Quel bilan fais-tu de cette saison 2023 ?
Anthony Ravard : Le bilan est positif. On a répondu aux objectifs fixés en début d’année. On voulait faire passer au moins deux coureurs au-dessus, en WorldTour ou ProTeam. C’est le cas avec Jordan (Jegat) chez TotalEnergies et on peut également compter Noa (Isidore) qui va dans la réserve de Decathlon AG2R La Mondiale et qui devrait ensuite rejoindre la WorldTeam. On avait aussi l’objectif de gagner en Classe 2, ce qui a été fait sur le Tour de Bretagne, le Tour d’Eure-et-Loir et l’Alpes Isère Tour. On a aussi gagné le Championnat du Danemark U23 avec Rasmus (Pedersen). On espérait également en claquer une en Classe 1. On n’a pas pu le faire, en revanche, mais on n’est pas passé loin avec plusieurs podiums pour Emmanuel (Morin), Pierre (Barbier) et Jordan (Jegat). On est 56e au classement UCI et la deuxième Continentale. On est aussi la première Conti au classement de la Coupe de France Pro, même si on visait le Top 5 et qu’on termine 6e à cause d’une chute au Tour de Vendée. Globalement, l’objectif a été atteint et le bilan est positif.

Beaucoup de coureurs s’en vont - huit - et par conséquent, beaucoup arrivent également pour 2024. La grande majorité des recrues débarquent du monde amateur !
Oui, toutes nos recrues françaises viennent de N1 (le Canadien Matisse Julien évoluait en Conti en 2023, NDLR). Notre vocation, c’est de former les athlètes à devenir de futurs champions, de les former aussi au niveau académique. L’idée est qu’ils sortent de chez nous avec un diplôme, sans oublier l’aspect social. Notre recrutement est donc porté sur les jeunes. Il faut tout de même des cadres mais finalement, Léo Danès, Maël Guégan ou Yaël Joalland sont déjà devenus des cadres et peuvent tenir ce rôle-là. On perd Emmanuel Morin, qui nous a énormément apporté, mais je pense que l’on a fait ce que l’on devait faire ensemble. Ce n’est pas négatif qu’il parte, ni pour lui ni pour nous. Enzo Boulet et Joe Rye-Johnsen pourront désormais jouer leur carte au sprint. C’est le but, on est là pour les former.

« IL Y A DES INCERTITUDES CAR ON NE SAIT PAS CE QUE CES COUREURS VAUDRONT CHEZ LES PROS »

Tu as aussi fait le choix de recruter Clément Braz Afonso et Artus Jaladeau, deux coureurs de 24 et 23 ans, qui ne sont plus Espoirs depuis un petit moment…
Ce sont des paris mais ça reste dans notre ADN et notre projet. Clément a fait de très longues études, Artus ne fait du vélo que depuis deux ans. On avait besoin de ces profils-là après le départ de Jordan (Jegat). On a des sprinteurs, des puncheurs, des baroudeurs… Et donc ces deux grimpeurs, en plus de Yaël Jolland. C’est bien, on est homogènes. On manque de purs rouleurs, c’est sûr. Mais à ce niveau-là, pour rivaliser avec les meilleurs, c’est quelque chose ! L’équipe est plus jeune que d’habitude, globalement, mais ça ne veut pas dire que l’on sera moins performant. Bien sûr, malgré tout, il y a des incertitudes car on ne sait pas ce que ces coureurs vaudront chez les pros. Mais on n’a pas la pression du résultat. Le but est de saisir les opportunités sans avoir peur du niveau WorldTour. Ils ne peuvent que progresser.

Tu évoques l’académie : aucun membre de la section Juniors ne rejoint la Conti cet hiver. Pourquoi ?
On voulait le faire avec Esteban Foucher (qui s’est engagé avec le VC Rouen 76, NDLR). C’est un souci de budget. Trois coureurs étaient financés l’année dernière mais on les a perdus. Il a fallu trouver 100.000 euros. Ça a été fait mais entre-temps, on a dû diminuer l’effectif de 14 à 12 coureurs. On a préféré faire l’impasse et le faire attendre une année dans un club amateur, quitte à le voir revenir en Espoir 2. Mais si on avait eu le budget, il aurait été le quatorzième homme.

« IL FAUT LE VOIR POSITIVEMENT »

Avec douze coureurs en 2024, y’aura-t-il des adaptations de faites en termes de calendrier ? Évoluer sur deux fronts reste-t-il envisageable ?
C’est un peu plus limite à douze. Disons qu’on aura un front et demi. Nos jeunes pourront faire quelques Élites. On va rester à peu près sur le même principe, avec des Classe 2 pour les jeunes. On essaie quand même d’avoir un treizième coureur, suivant les partenaires qui vont arriver ou non.

Il y a aussi la concurrence de toutes les Conti françaises…
L’arrivée des Conti de développement, il faut le voir positivement. Ça structure le monde professionnel. On le voit dans les autres sports comme le football. Mais ce qui me fait peur, c’est que beaucoup d’athlètes arrêtent leurs études très tôt, très jeunes. Et au bout de deux ans en Conti, il y aura un déchet social lorsque certains ne continueront pas… C’est tout un système qui doit tenir la route. Il faudrait quand même revoir le cahier des charges des N1, je pense. Il est passé de 250.000 euros à 300.000 mais si tu ne fais pas de Classe 2, c’est compliqué de faire rayonner les partenaires privés et de tenir. Quoi qu’il en soit, il faut toujours des N1, N2… Le plus important, c’est de conserver cette pyramide.

« ON A ENCORE SIX MOIS DEVANT NOUS »

L’objectif est-il toujours de devenir ProTeam ?
Oui, c’est le projet. On veut devenir ProTeam en 2025. Il faut trouver un partenaire qui adhère au projet. On espère que ça puisse être concrétisé en juin car tout le reste en découle, notamment le recrutement. On a encore six mois devant nous pour pouvoir concrétiser ce projet. Sinon, on continuera en Conti pour tenter de le faire en 2026 et se structurer encore plus d’ici-là. Mais oui, on aimerait monter mais également intégrer les femmes dans l’académie, dans le centre de formation. Une fois qu’on aura stabilisé tout ça, en tant que passionné de vélo, l’idée sera d’aider le cyclisme amateur à la base.

À quoi penses-tu ? 
Lors de notre prochain stage, toutes les écoles de vélo seront là avec nous. Ils feront le goûter avec les pros, ils auront des autographes, on donnera les bidons etc. On aimerait aussi créer des vocations, communiquer auprès des écoles alentours pour faire visiter le bus, rencontrer nos coureurs… Je pense aussi à un calendrier à la hauteur dans la région pour les Minimes-Cadets. Je veux développer mon sport. On veut des résultats avec l’équipe première pour continuer de grandir, mais il n’y a pas que ça. L’équipe doit servir au territoire. C’est l’essence de notre projet. 

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