Peter Sagan : « C’est le karma »

Crédit photo Maxime Segers - DirectVelo.com

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Jamais deux sans trois. Peter Sagan n’a pas fait mentir l’adage dans les rues surchauffées de Bergen (Norvège). Le Slovaque est devenu, grâce à un jump sur la ligne, le premier à remporter trois titres mondiaux consécutifs sur route chez les hommes. "Je ne sais pas si ça va changer quelque chose dans le monde, mais pour moi, c’est incroyable", s’amuse-t-il, dans un anglais qu’il s’est efforcé de maîtriser.

« JE N'AI PAS DE STRATÉGIE »

Pourtant, au panneau des trois kilomètres encore, le Slovaque n’osait même plus songer à une année supplémentaire drapé de l’arc-en-ciel. "De derrière, je regardais la course", raconte-t-il. "Je pensais qu’on roulait pour la troisième, la quatrième ou la cinquième place. Mais sûrement plus pour le titre. Puis j’ai vu qu’on reprenait Alaphilippe, et que ça pouvait arriver au sprint. Si j’avais prévu de prendre la roue de Kristoff ? Ca se décide tellement vite qu’on n’a pas le temps d’établir un plan. C’est de l’instinct, un mouvement à effectuer dans la seconde. Je ne pense pas qu’on rêve de tels plans pendant la nuit. Et puis, je n’ai pas de stratégie !"

Comment, dès lors, parvient-il à maîtriser cette course à l’arc-en-ciel dont l’enjeu tend à tétaniser de nombreux pédaleurs du peloton? "C’est le karma", promet-il. "Il y a beaucoup de courses dans l’année, mais un seul Mondial, il faut toujours de la chance. C’est comme une loterie, ça peut tourner en ta faveur ou non. Je n’avais droit qu’à une cartouche. Si je passe à l’attaque, je n’ai plus d’énergie pour le sprint. Alors, que faire ? Ca prouve que les miracles existent ! Puis finalement, ce n’est pas plus mal que ce soit moi, on verra les maillots de Champion d’Europe et du Monde l’an prochain."

LA TCHECOSLOVAQUIE RECONSTITUÉE

Face aux blocs norvégien, italien, belge ou français, l’équipe de Slovaquie est parvenue à manoeuvrer aisément, s’appuyant aussi sur une Tchécoslovaquie recomposée le temps d’une épreuve cycliste. "Chaque nation doit composer avec des coureurs qui sont concurrents toute l’année", analyse Sagan pour DirectVelo. "Nous ne sommes que six, mais j’ai les mêmes équipiers en équipe nationale et chez Bora-Hansgrohe. D’ailleurs, j’ai eu droit au bus, au camion, aux mécanos, aux soigneurs de l’équipe ! Je garde toujours le même groupe autour de moi."

Et tant sur le vélo qu’au bord des routes, Sagan bénéficiait d’un soutien incroyable. Les drapeaux slovaques étaient nombreux, et les cris au pied du podium très vigoureux. "J’ai entendu de fameuses histoires", raconte-t-il. "Des fans sont venus de Cracovie. La moitié de l’avion était remplie par mes supporters. Le problème, c’est que l’autre moitié était pour Kwiatkowski. Puis il y a des gens de Vienne, de Prague, … et même les Norvégiens nous ont beaucoup encouragés, c’était dingue !"

Lorsqu’on l’interroge sur une possible revanche sur son exclusion au Tour de France, l’enfant de Zilina préfère philosopher. "Je n’ai plus pensé au Tour, ça ne m’a jamais pesé", affirme-t-il. "Quand quelque chose de négatif t’arrive, c’est pour avoir droit à un meilleur moment après. Il faut toujours être optimiste. Cette année, j’ai 50 ou 55 jours de course, donc j’ai pu profiter de la famille en juillet. C’était plutôt sympa !"

VACANCES ANTICIPÉES

S’il n’est jamais le premier à se plonger dans les livres d’histoires, sa série pourrait bien s’arrêter à trois. Le tracé de Innsbruck (4670m de dénivelé pour les Elites) n’est pas le plus favorable à ses qualités. "Tant mieux, je serai plus tôt en vacances", s’esclaffe l’icône de Bora-Hansgrohe. "Non mais vous me parlez toujours de vélo, moi je profite de la fin de saison ! Du repos, ça fera du bien."

En 2017, Sagan n’épinglera plus le moindre dossard sur sa combinaison irisée. Il rentre désormais auprès de son épouse, Katarina, qui accouchera prochainement de son premier enfant. "Je ne réalise toujours pas que je vais être papa. Je ne sais pas ce que ça va changer. Je n’y pense pas. C’est comme le sprint, quand il se présente, je réaliserai. Je vis jour après jour. Qui sait ce qui se passera demain ? Alors on verra plus tard. Je ne sais pas si je ferai moins de courses."

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