On a retrouvé : Jérémy Fabio

Crédit photo Guy Dagot - www.sudgirondecyclisme.fr

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Jérémy Fabio ne s'est jamais contenté de suivre la meute. Fidèle à sa philosophie offensive, l'ancien sociétaire de Martigues SC n'a pas compté ses coups de pédale en tête de course. S'il a très souvent joué le rôle d'éclaireur, toutes les tentatives d'échappées du Champion de PACA 2013 n'ont pas été vaines. Au fil des saisons, il s'est constitué un solide palmarès avec entre autres une étape du Tour du Loir-et-Cher (2.2) en 2012, le Tour du Canton de Saint-Savin (Coupe de France DN2), en 2012, et le Grand Prix de Cherves (Coupe de France DN2), en 2014. Aujourd'hui éloigné des pelotons, Jérémy Fabio, 31 ans, se livre auprès de DirectVelo.

DirectVelo : Tu avais pour projet d'ouvrir ton propre magasin de cycles (lire ici). Ce projet s'est-il concrétisé ?
Jérémy Fabio : Oui, je l'ai fait avec mon pote Maxime Mayençon (ancien coureur du CR4C Roanne et Charvieu-Chavagneux IC notamment, NDLR) : on a ouvert Golden Cycles, à Nice. L'affaire marche bien. Récemment, on a agrandi, et doublé la surface du magasin. Nos clients sont en majorité des cyclos, donc ce n'est pas la même approche que celle de la compétition. On parle davantage de 50/34 que de 53/39. C'est un autre vélo, mais c'est sympa.

Tu as déjà travaillé en tant qu'employé dans un magasin de cycles, mais maintenant, c'est toi qui gère l'affaire avec Maxime Mayençon...
Ça change. Quand c'est ton magasin, tu es dans l'affaire à 100%. C'est différent, je travaille pour moi, et plus pour quelqu'un d'autre. Mon rôle a également changé. Je m'occupe davantage du côté relationnel. Je passe du temps à parler avec les clients. Mais, avec Maxime Mayençon, on ne fait pas que ça. On est en quelque sort des couteaux suisses. Il faut tout faire, donc on fait tout !

« TOUJOURS LE MÊME ÉTAT D'ESPRIT »

Le fait d'avoir évolué à haut niveau constitue-t-il un atout ?
C'est rigolo, parfois, des gens me prennent pour un macabre et me demandent si j'ai déjà couru. Je leur réponds que je prenais juste le départ pour faire le nombre (rires). En général, comme on a nos noms sur le magasin, les gens regardent, et cherchent les résultats. Parfois, ils viennent me dire que je faisais de belles courses. Après ça, les gens sont plus à l'écoute des conseils que l'on donne. Je ne suis pas là uniquement pour vendre, j'aime conseiller les clients. Comme j'ai couru, je sais ce qu'ils attendent, et dont ils ont besoin. On a beaucoup de touristes au magasin qui viennent de France, voire d'autres pays en Europe. Comme on a beaucoup couru, parfois, on se souvient d'une course disputée vers chez eux.

Tu étais réputé pour ton caractère jovial et détendu. Est-ce encore le cas aujourd'hui ?
J'ai toujours le même état d'esprit. Des fois, je rencontre des petites contrariétés, mais il faut toujours essayer de positiver, et d'être de bonne humeur. Ce n'est quand même pas terrible d'arriver au boulot en tirant la gueule. J'aime mettre l'ambiance. Comme le magasin vend la marque Bianchi et que l'on proposait un modèle spécial en souvenir des vingt ans de la victoire de Marco Pantani sur le Tour de France, un mec est venu de Paris pour l'acheter. On a craqué des fumigènes pour lui, et on lui a chanté des chansons sur Pantani. Il a adoré. Il a dit qu'il avait été reçu comme un roi (rires). On fait toujours des petits spectacles. On rigole souvent, mais il faut savoir être sérieux quand il est nécessaire de l'être.

Cela a-t-il été difficile de tourner la page de la compétition ?
Le vélo, ça ne va qu'un temps. C'est une superbe expérience, on rencontre beaucoup de monde, mais un jour, il faut passer à autre chose. Désormais, les journées sont bien remplies. Je suis marié, et j'ai un enfant. J'ai passé le relais.

« J'AI UNE RÉPUTATION »

Tu étais également réputé pour ton caractère offensif et tes nombreuses échappées. N'aurais-tu pas obtenu davantage de résultats en te canalisant ?
Je n'ai de regrets de ce point de vue. Quelque fois des gens viennent me voir, et me disent qu'ils se souviennent de mes échappées. Finalement, ils se souviennent de moi plus pour mes échappées, et quand je faisais n'importe quoi. Ce ne serait pas le cas si j'avais ratonné... Les gens se souviennent que j'ai fait le spectacle. Certains se souviennent même de choses que j'ai oubliées. Bizarrement, j'ai une réputation (rires).

La compétition te manque-t-elle ?
Honnêtement, les courses ne me manquent pas du tout. Ce qui me manque, c'est l'adrénaline, le risque dans les descentes ou quand ça frotte, et de se faire mal à la gueule.

Quel regard portes-tu sur le cyclisme professionnel où les attaques se font parfois rares ?
Il y a beaucoup de business et d'enjeux, donc les équipes calculent. Si les coureurs étaient plus libres, ils attaqueraient plus, et se feraient plus plaisir. Mais ils sont bridés. En plus, les réseaux sociaux ne tolèrent pas les écarts comme une bière. Ils doivent se faire moins plaisir. Ils doivent même se faire chier ! Il n'y a pas mieux que le Tour de France pour faire la sieste. Mais c'est aussi parce que ça roule vite dans le peloton, et que ce n'est pas possible d'attaquer. Les mecs sont humains. Malheureusement, il manque quelque chose, et un grain de folie.

« DEUX FILS SE TOUCHENT »

Tu aurais mis le feu, toi ?
Je ne sais pas pendant combien de temps, mais je me dis que oui (rires). Quitte à péter, autant le faire avec les honneurs.

Et aujourd'hui, est-ce que tu pratiques encore ?
Je ne roule plus beaucoup avec mon petit. J'ai pris dix kilos hors taxes, donc quinze toutes taxes comprises (rires). Je pourrais aller rouler tranquille entre midi et deux, mais quand je roule, je ne peux pas m’empêcher de mettre des sacs. Même si je craque juste après, j'aime avoir le goût du sang dans la bouche. Ça me donne de l’adrénaline. Deux fils se touchent dans ma tête, et je fais n'importe quoi pendant cinq minutes.

Est-il possible de te revoir un jour dans les pelotons ?
Il y a le problème du manque de temps. Je travaille parfois soixante-dix heures par semaine, et j'ai une vie de famille. Il y a peu, j'ai fait une épreuve gentleman avec un collègue, c'était sympa, mais ce n'était pas fou. Quand tu as couru à un certain niveau, et que tu sais que tu ne le retrouveras pas, c'est difficile de retrouver la motivation. Pour avoir un bon niveau, il faut beaucoup de temps, donc ce n'est pas possible que je mette à nouveau un dossard.

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