Discrète et ambitieuse, Maëva Squiban sur le Tour à 20 ans

Crédit photo Zoé Soullard / DirectVelo

Crédit photo Zoé Soullard / DirectVelo

Maëva Squiban sera l’une des benjamines du Tour de France, qui s’élancera de Paris, au pied de la Tour Eiffel, dimanche prochain. “On était douze pour six places. Tout le monde rêvait d’y être. J’espère que je ferai honneur à ma sélection et à mon maillot”, déclarait-elle pour DirectVelo en marge du Championnat d’Europe d’Anadia, au Portugal (lire ici). Si elle se montre modeste, la sélection de Maëva Squiban ne faisait en réalité aucun doute au sein du Stade Rochelais Charente-Maritime. Avec deux Top 10 d’étapes sur le Tour de Bretagne, deux Top 20 lors du week-end morbihannais, une 8e place à l’Alpes Grésivaudan Classic puis un Top 20 au classement général du Tour de Suisse, la Finistérienne est un élément fort de sa formation. Elle fait partie, comme d’autres filles de notre groupe, des meilleurs Espoirs françaises. C’est l’avenir du cyclisme français”, se satisfait son manager, Jean-Christophe Barbotin. “Si on m’avait dit qu’elle ferait le Tour à 20 ans, j’aurais eu du mal à y croire. C’est énorme, ça va être grandiose !”, se réjouit son père, Mikaël, qui va se rendre à Paris pour supporter sa fille lors du grand départ de l’épreuve, puis sur les étapes suivantes, sans savoir encore s'il ira jusqu'au terme. 

« ON A DÛ LA POUSSER »

Et dire que tout a commencé en forçant la main à la jeune femme. D’abord adepte de la piste et du VTT, Maëva Squiban n’était pas franchement attirée par la route lors de ses jeunes années sur le vélo. “On a tout de suite détecté une force naturelle chez elle, ça se voyait clairement. Mais elle n’était pas du tout attirée par la route, même si on lui a vite rabâché qu’elle avait un potentiel pour bien marcher sur la route”, se souvient François Bramoullé, qui connaît la jeune femme depuis les Minimes 1 et qui l’a longtemps entraînée, tout en continuant de la suivre de près et de jouer un rôle important actuellement. “Je me rappelle qu’on a dû la pousser pour qu’elle dispute le Championnat de France Cadettes”. En 2017 en effet, Maëva Squiban se décide, à reculons, à disputer quelques épreuves sur route. Deux-trois en Bretagne, sur ses terres, puis le Tour d’Auvergne, terminé à la 6e place. Quelques semaines plus tard, elle décroche ni plus ni moins que le titre national à Saint-Amand-Montrond, dans le Cher, en étant Cadette 1 (voir la vidéo d’arrivée). “Mais elle est restée sur la même lignée. Elle n’y croyait pas et disait qu’elle ne gagnerait jamais une autre course, avec le maillot bleu-blanc-rouge. Pour elle, c’était impossible”, sourit François Bramoullé. L’année suivante, elle confirme pourtant tout son talent en remportant la Coupe de France Cadettes. “C’est à partir de ce moment qu’elle a commencé à revoir ses positions et à envisager faire carrière dans le vélo, tout en restant concentrée et sérieuse sur ses études”.

Depuis, l’ancienne licenciée de l’AC Gouesnou a souvent fait preuve de précocité. Notamment lors du Tour de l’Ardèche 2020, lorsqu’elle a disputé les sept jours de course, à 18 ans, en qualité de stagiaire professionnelle (lire ici). “Elle a toujours eu l’habitude de franchir les paliers avant beaucoup d’autres. Elle avait attaqué sans arrêt en Ardèche. Maëva n’a pas froid aux yeux”, témoigne Jean-Christophe Barbotin. Petit à petit, l’athlète bretonne fait son nid, sans faire de bruit. “C’est son caractère au quotidien. Elle ne va jamais se mettre en avant ou se vanter de ce qu’elle fait. Si elle ne connaît pas les gens, elle ne va pas facilement discuter. C’est de la timidité, elle est réservée”, confirme son père, Mikaël. “Mais elle est prête pour assumer des responsabilités sur le vélo et je sais que ça a déjà commencé. Elle a pris ses marques, elle n’hésite plus à passer des coups de gueule dans l’équipe, auprès d’autres filles, si quelque chose ne va pas. Au début, elle n’osait pas trop face à des filles plus expérimentées qu’elle, mais ça commence à venir”, poursuit-il à propos de sa fille. “Elle n’a pas une grande confiance en elle, dans le sens où elle ne se sent peut-être pas encore légitime ni à sa place au milieu des meilleures, qui ont un bien plus grand palmarès, ajoute Jean-Christophe Barbotin. Mais ça viendra, elle est encore toute jeune. Il faut qu’elle grandisse. Elle vient d’avoir 20 ans, ne l’oublions pas. Pour l’instant, elle est encore impressionnée par ce qui l’entoure. Mais attention, elle a la caisse, c’est sûr”.

« ELLE NE VA JAMAIS SE PLAINDRE »

Maëva Squiban est discrète dans la vie de tous les jours, mais ça ne la rend pas moins ambitieuse. “C’est une acharnée de travail, elle sait se faire très mal. Je l’ai traînée plus d’une fois derrière scooter et je peux assurer qu’elle ne rechigne jamais à la tâche. Mais elle n’en fait pas trop non plus. Elle s’est toujours tenue à ce qu’on lui a dit. Parfois, elle regarde son programme d’entraînement et elle dit : « je n’ai que ça ? ». Elle ne va jamais se plaindre”, raconte François Bramoullé. “Elle est dure au mal. Qu’il fasse chaud, froid… Qu’elle rentre trempée, peu importe. Elle ira toujours rouler et elle sait pourquoi elle le fait”, confirme Mikaël.

Étudiante en STAPS à Brest depuis deux ans - elle effectuera sa troisième année à Poitiers pour se faciliter la vie, les déplacements etc. -, Maëva Squiban va donc se frotter aux meilleures mondiales, à partir de dimanche, sur les routes du Tour de France. “Dès qu’elle peut aller à l’attaque, il faut qu’elle y aille. Elle doit retrouver cet instinct qu’elle a un peu perdu. Elle s’est bridée sur certaines courses car il est important pour son équipe de faire des places et de marquer des points. Mais elle est capable de faire la course”, considère François Bramoullé, qui fait notamment référence au dernier Tour de Suisse, où la jeune femme avait défendu une 16e place au classement général le dernier jour. “J’espère qu’elle pourra aller de l’avant sur une ou plusieurs étapes. Je suis sûr qu’elle a envie d’aller au charbon, d’essayer. On n’est pas à l’abri d’une bonne surprise. Elle nous a déjà épatés plus d’une fois”, appuie-t-il.

« ELLE NE SERA PAS IMPRESSIONNÉE PAR LES ENJEUX »

“J’imagine qu’elle va essayer de prendre une échappée, de se montrer. Il ne faudra pas faire de complexe d’infériorité”, lance son père. Comment le manager de l’équipe imagine-t-il le Tour de France de Maëva Squiban ? “C’est dans sa nature d’aller dans des coups. C’est une bonne petite puncheuse. Je suis sûr qu’elle ne sera pas impressionnée par les enjeux. Une fois arrivée sur place, peut-être que la pression va monter d’un coup. Sûrement, même. Mais pour le moment, je la sens sereine et elle peut faire de belles choses”.

Pendant le Tour de France, Mikaël Squiban, François Bramoullé et quelques membres ou présidents de clubs finistériens continueront d’échanger sur les réseaux sociaux, sur un fil de discussion nommé « Fan Club Maëva Squiban ». Sans se prendre au sérieux, avec simplement fierté et bonheur de voir leur petite protégée sur les routes de la plus belle course au monde. En attendant, Maëva Squiban a passé les derniers jours “pratiquement confinée”, pour ne pas prendre le moindre de risque d’attraper la Covid-19. Après avoir effectué une dernière longue sortie de cinq heures, elle a cumulé les petites sorties nocturnes, à 21h, elle qui a passé les dernières journées en terres girondines, où il fait particulièrement chaud. “Le travail de fond a été fait, se satisfait son père. Maintenant, elle n’a plus qu’à tourner les pattes et attendre le Jour-J”.

Pour retracer la (jeune) carrière de Maëva Squiban, cliquez ici pour (re)découvrir tous les articles consacrés à la Finistérienne depuis 2019. 

Mots-clés

En savoir plus

Portrait de Maeva SQUIBAN