On a retrouvé : Anthony Mira

Crédit photo Camille Nicol

Crédit photo Camille Nicol

Au fil de sa carrière, Anthony Mira n’est jamais parvenu à exploiter la pleine mesure de son potentiel. “Bridé par un entraînement trop conséquent, l’ancien sociétaire de l'AC Lanester 56, Sojasun espoir-ACNC (2012-2013) et de l’UC Nantes Atlantique a fait exploser le moteur, en 2014.  Après avoir “pété un plomb” sur la Ronde de l’Oise, il a décidé de raccrocher le vélo. Définitivement. Aujourd’hui éloigné des pelotons, le Breton âgé de 26 ans garde néanmoins quelques bons souvenirs de sa carrière, à commencer par les Championnats de France Juniors 2010 à Brécey (Manche) où il a décroché la médaille de bronze derrière deux coéquipiers. Auprès de DirectVelo, il se replonge dans les souvenirs de cette journée, ainsi que dans ceux de sa carrière.

DirectVelo : Avec trois Bretons aux trois premières places du Championnat de France Juniors 2010, le Comité de Bretagne a réalisé un carton plein, à Brécey !
Anthony Mira : Cette course a marqué et elle m’a marqué, moi aussi. On a fait le triplé avec Mathieu Le Lavandier et Geoffrey Millour. Je m’en rappelle très bien. Il me semble que c’était la première fois qu’un Comité réalisait un triplé sur un Championnat de France. Au cours de cette journée, tout m’avait marqué du matin, où tout le monde était motivé et remonté avant la course, jusqu’au soir avec l’émotion du podium. Quand je repense à ces moments, c’est ce qui me donne envie de revenir sur un vélo…

Ce jour-là, impossible d’envisager un meilleur scénario pour ton équipe...
Mathieu Le Lavandier est parti seul dans le final et on est resté tranquillement dans le peloton. On le protégeait. Le peloton n’a pas réagi. Dans le dernier tour, on voyait que tout le monde se fatiguait à tenter sa chance. Avec Geoffrey Millour, on a profité d'un moment où tout le monde se regardait. On a réussi à sortir seuls et à arriver main dans la main. Ce n’était pas un coup de bol mais simplement la preuve que l’équipe était au-dessus du lot, ce jour-là. On avait l’esprit de groupe. Pour la plupart d’entre nous, on se voyait en dehors du vélo et c’est ce qui faisait notre force. Un Championnat de France, c’est très particulier mais personne n’avait envie de rouler sur son collègue dans notre équipe.

Aviez-vous spécifiquement préparé ce rendez-vous ?
Oui, il y avait eu plusieurs stages et plusieurs courses de préparation avec le Comité de Bretagne. On a appris à rouler ensemble, alors que les autres équipes roulaient davantage comme des adversaires. Cela nous a permis de connaître la force de chacun, son niveau et de pouvoir déterminer les rôles en vue du Jour-J. La Bretagne est toujours en force sur les Championnats de France. Je ne sais pas vraiment pourquoi. Peut-être parce que les Bretons sont les meilleurs (rires).

Aujourd'hui que te reste-t-il de ces instants ?
Encore aujourd’hui, cela reste un sacré souvenir. J’ai placé ma médaille de bronze dans un grand cadre qui se trouve chez moi. Je passe devant tous les jours en allant au travail. J’ai conservé des photos de cette journée. Il m’arrive également de croiser des anciens de la région qui me parlent de ce Championnat de France. Ce sont des souvenirs qui reviennent tout le temps.  

« IL ME CONNAISSAIT MIEUX QUE JE NE ME CONNAISSAIS »

Après ce triplé, l'ambiance devait être excellente...
Pour les dirigeants et notamment Samuel Monnerais (alors CTR de Bretagne), c’était quelque chose de super. Après avoir franchi la ligne d’arrivée, nous étions tous dans les bras des autres. Ça s’est terminé au Champagne ! Je me souviens que l’on avait fait la fête le soir même. Il y avait un camping sur place. On est resté et on a fait une petite soirée. Avant les Championnats de France, nous avions fait un pari avec Samuel Monnerais : en cas de victoire, il devait nous payer une soirée en boite de nuit. Une fois rentré en Bretagne, nous sommes allés au Tremplin (une discothèque située à Montauban-de-Bretagne, NDLR). Nous avons passé une belle soirée.

Si tu étais devenu Champion de France, ce jour-là, ta carrière aurait-elle été différente ?
Non. Je ne pense pas que ça aurait pu changer quelque chose. Forcément, une victoire m’aurait fait porter le maillot bleu-blanc-rouge mais le Championnat de France reste une course d’un jour, et ce n’est pas sur une seule journée que l’on peut peut faire ses preuves.

Que t’a-t-il manqué pour parvenir à percer au plus haut niveau ?
En 2011, j’ai couru en 2e Catégorie à l’AC Lanester 56. Je respectais les consignes de mon directeur sportif de l’époque, Rodolphe Henry. Il me connaissait mieux que je ne me connaissais moi-même. Il m’avait dit de ne pas partir tout de suite dans une grosse écurie et de commencer en 2e Catégorie. Il savait que j’étais un coureur qui marchait au jus et non en faisant des grosses courses de foncier. Il voulait que je participe à de petites épreuves pour commencer. Malheureusement, mes premières courses chez les Elites ont été concluantes. Dès ma première année Espoir, j’ai terminé dans le Top 20 de Manche Atlantique (17e, NDLR).

Malheureusement” ?
Après, je suis directement passé en 1ère Catégorie, puis j’ai signé chez Sojasun espoir-ACNC pour la saison 2012. Du coup, j’ai changé de directeur sportif. Je pense que ça a été mon erreur parce qu’on ne se connaissait pas. J’ai fait beaucoup de volume à l’entraînement et j’aurais dû dire stop. Je pense que ça m’a bridé le moteur et ensuite, je n’ai jamais réussi à faire des résultats. Je n’avais plus de jus, je faisais de trop grosses séances d’entraînement. Maintenant, avec le recul, j’ai compris. Quand je courais, j’avais la tête dans le guidon et je ne cherchais pas à comprendre. Maintenant, je sais que je ne m’entraînais pas comme il le fallait. Une carrière, cela ne tient à rien. En tout cas, le monde du vélo est un monde un petit peu barbare : si tu es bon et que tu as des résultats, il y a des gens autour de toi. Sinon quand tu n’es plus premier, on peut très vite t’oublier.

« J'AI RÉUSSI À TOURNER LA PAGE »

Cela a-t-il été ton cas ?
Oui et non. J’ai toujours eu la famille à mes côtés. En 2014, lors de ma dernière année de vélo, je courais à l’UC Nantes Atlantique, une grosse écurie qui participait à de grosses courses. J’aurais dû lever le pied avant de péter un plomb, ce que j’ai fait en juin, sur la Ronde de l’Oise. J’ai donné le vélo au mécanicien et j’ai dit : ‘’j’arrête’’. J’ai eu un gros ras-le-bol et j’ai tout lâché. Avec le recul, je me dis que j’aurais dû parler au directeur sportif. Peut-être qu’il aurait trouvé une solution et qu’aujourd’hui, je ferais toujours du vélo.

Est-ce encore un regret pour toi, aujourd’hui ?
D’un côté, je ne regrette rien parce que j’ai tout donné et tout fait pour que ça marche. C’est d’ailleurs ce qui m’a fait péter un plomb. Mais d’un autre côté, aujourd’hui avec le recul, je me connais mieux et je serais capable de gérer mon entraînement et mon calendrier. À l’époque, je devais être devant sur toutes les courses au lieu d’en cibler quelques unes... Depuis que j’ai arrêté, je ne suis pas monté sur le vélo. Cela dit, je suis très content de ma nouvelle vie. J’ai réussi à tourner la page.

Justement, comment as-tu tourné la page ?
Quand je courais, je travaillais également à Décathlon où j’étais mécanicien. Je voulais toujours avoir une “roue de secours”. Cependant, quand j’ai arrêté le vélo, j’ai aussi arrêté mon activité à Décathlon. Je voulais totalement changer d’univers et couper avec le vélo. Puisque j’étais également passionné par les voitures, j’ai effectué une formation de carrossier-peintre. Aujourd’hui, je travaille dans l’entreprise de mes parents où je suis devenu gérant.

Est-il possible de te voir reprendre le vélo un jour ?
Je pense. Je suis en manque de sport. Quand tu as fait vingt heures de vélo par semaine pendant huit années, ton corps en a besoin. Actuellement, je ne fais pas de vélo mais je pratique la course-à-pied et je vais à la piscine. J’aimerais revenir sur un vélo un jour et j'espère que ça sera avec mon petit garçon. Je vais devenir père dans quinze jours. Peut-être que mon fils sera un mordu de vélo. Avec mon père (Juan Mira, NDLR), le vélo, c’est une belle histoire dans la famille.

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